A l'ombre de la tente princière

Au sein du campement, aux abords du Châtelet.







Peu à peu ce jour là depuis le premier chant du coq, le fief organisateur des festivités sembla progressivement prendre vie. Les joutes étaient sans doute ce qui se faisait de mieux en terme de distraction de ce que le Royaume comptait de nobles seigneurs et la fête avait su attirer du beau monde en Touraine. Ici et là crépitaient quelques feux dont les fumées odorantes semblaient se rejoindre dans le ciel, les boeufs tiraient impassibles leurs lourds fardeaux, tandis que les terres de Roches-l'Evêque se revêtirent d'un manteau éphémère brodé de toiles de tentes bien dressées.

Ca sentait déjà bon les victuailles rôties comme les vins fameux parmi les allées du campement. Il se faisait entendre régulièrement quelques bruits de marteau et de ferraille tandis que chaque Chevalier achevait de passer son équipement au peigne fin avant le début des joutes. L'humeur générale semblait au beau fixe.

Une de ces tentes fièrement armoriée, modèle taillé pour les grand seigneurs, avait été investie par son Altesse le Prince de Pontoise qu'accompagnait pour l'occasion messire Raoul de Montjoye. Sur les ornements héraldiques de la teinture à peine chahutée par le vent, les lys du Prince côtoyaient non sans un certain panache les lions du Champion du dernier tournoi savoyard. Au dehors se relayaient une poignée d'hommes d'arme de rigueur en temps de guerre, tandis que l'intérieur offrait tout son modeste confort aux participants ainsi qu'à leurs fidèles écuyers.


Messire de Montjoye avait mis à profit un peu de son temps libre à fumer la pipe en se délassant parmi les vapeurs d'un agréable bain chaud, initiative qui lui avait permis de se requinquer après le dernier périple bourguignon de la compagnie. Et une fois peau neuve retrouvée, de noirs et sobres atours revêtus et ses éperons dorés lustrés avec ferveur, voilà que le Piémontais avait rejoint Altesse et mesnie dans la pièce principale de l'habitat de fortune.

Tout en se saisissant d'un généreux verre d'Armagnac, son vieux pêché mignon, le surnommé Lézard avait finalement demandé au Prince :


" La rumeur dit que le Carmin est homme d'infanterie plutôt qu'adepte de la charge de cavalerie. Ne serait-ce là que simple superstition ? "


Tout en levant un premier verre à la santé du maître des lieux, Montjoye en proposait un second à son illustre compagnon de faits d'arme.

Les hommes avaient trinqué gaiement à la Maison du Val de Loire, à la valeur de l'infanterie, ils avaient bu au Bouillon comme au cul de la Bretagne, et tout ça avec l'audace de faire une grimace à l'Armagnac.

Montjoye avait glissé entre deux rasades :


" Peu importe si la rumeur nous précède, pourvu que l'on ait toujours une longueur d'avance sur notre destin. "


Le Prince appelait enfin un autre frère d'arme, celui qui joutait à domicile, à venir partager le verre de l'Amitié avant de molester quelques écus selon la plus pur tradition. A mesure l'invitation trouva son écho amplifié par les hérauts qui se passaient le mot comme un relais jusqu'à son destinataire.

Visiblement le Salmo Salar ne partageait pas une égale passion à celle du Montjoye au sujet des entames de journée si généreusement alcoolisés. Messire Raoul tout en appréciant de son regard la robe de son poison favori, ne trouva rien d'autre pour sa défense qu'un flegmatique haussement d'épaule.

La fête pouvait commencer.

Alors que P3 était passé voir sa promise juste a coté là ou les vassaux du Val se rassemblaient, il entreprit d'aller voir Namay et Raoul, qu'il savait non loin.

Encore une fois il tombait a pic.

Sniff sniff...

Ca sent le bon vin dans le coin. Dit il plein sourire.

Montjoye, après avoir chaleureusement salué messire Pierre du Val de Loire, avait tiré l'une des épées fichées dans le sol de sa main dextre tandis que sa senestre s'était trouvé une des bouteilles de Bourgogne ornant la table.

Conformément à la volonté du Prince, le Lézard se fit bourreau de bouchon de liège. Il maintint fermement le-dit bouchon vers le haut au préalable et en évitant de viser dans la direction de ses compagnons. Il posa ensuite la lame bien à plat sur le verre, puis d'un glissement sec placé à revers et sans forcer, messire Raoul fit décoller le col du flacon avec son bouchon.


Plok ...


" Parce que Dieu et nous seuls pouvons ... "

Cette citation échappée des lèvres du Piémontais comme une boutade, était alors la devise des Bourreaux, seuls habilités à faire décoller des têtes sans que cela ne soit considéré comme crime.

Des tentes, des tentes et encore des tentes...sur il y avait foule et la Lady commençait a souffrir des pieds a force de cavaler de droite à gauche.
Quelle idée aussi d'avoir mis des bottes neuves, mais à sa décharge personne lui avait causé de randonnée.
Puis toujours coquette aussi...

Un garde interrogé un peu plus au sud, lui avait indiqué que Dame Line devait être par là, elle même cherchant son promis..

Pratique se dit l'écossaise, on va jouer a cache cache...pas très protocolaire tout ça...

Encore une tente, des voix et des cling cling? surement par là...
Un pas prudent une tête passée en mode discret ou presque et là...

Line!!! Enfin! ...oui la brune est exubérante.. regard vers l'assemblée... Messire Pierre ...légère rougeur qui s'installe alors qu'on la fixe mal à l'aise dans son rôle cheveux on the soup...Messire Zebra....regard inquiet vers Line façon "au secours qui sont les autres? Révérence or not révérence that is the question???" et fixette sur le bout de ses bottes ne sachant plus trop quoi faire du coup.

Où l'on commence par se rappeler que Line avait précisément décidé de rester à l'écart des derniers exploits de son fiancé. D'autant plus certaine que ce dernier ne la remarquerait pas depuis son point d'observation. Et bien c'était loupé, et cela grâce à la délicatesse d'Eden qui en manquait pour le coup.

Alors que Line grimaçait par avance, certaine que le manège n'échapperait à personne, voilà qu'Eden en rajoutait une couche en écorchant le protocole en beauté.

Et Line de lui souffler entre les dents "Merci, je vais être obligée d'être ravie pour l'exploit en cours... Et quand tu vois autant d'étendard et de gens de qualité, c'est le moment d'user du "votre grâce"...

La jeune femme releva ensuite la tête en arborant son plus beau sourire, Votre altesse, votre grâce, les Roches-l'Evêque, Montlouis, vous vous livrez là à une avant-bouche des plus ... délicates... Pourvu que l'ironie ne transparaisse pas trop.



Un nouveau murmure à l'égard d'Eden, c'est le Prince de Pontoise. Il n'était déjà plus temps de lui expliquer les subtilités protocolaires. Pourvu qu'elle ne gaffe pas avant que Line ait eu le temps de la présenter!

"Merci, je vais être obligée d'être ravie pour l'exploit en cours... Et quand tu vois autant d'étendard et de gens de qualité, c'est le moment d'user du "votre grâce"...

Les yeux de jade se posent sur les différents protagonistes, inspectent l'assemblée, n'y trouve aucun bourrelet suspect et murmure:

Hein? tu trouves que Pierre et Zebra ont grossi? Tu sais c'est pas fort gentil de leur faire remarquer....

Ne remarque pas l'air surpris de son amie qui elle sans se démonter continue à leur parler...de bouche?
Perplexe la brune..
Nouveau chuchotis de Line qui plonge encore plus l'écossaise dans l'embarras.

Prince de Pontoise?? Pierre??? mais non voyons! lui c'est ton promis! mon héros!
Je t'ai raconté la fois où il a signé ma chemise??

Attends je te montre!


Et comme si elle était dans un salon pour dames voila le jeune femme en train de tirer su sa chemise afin de prouver ses dires totalement inconsciente des regards posés sur elle.

La Vosne toujours bien en main, bouchon suspendant son vol sous les regards assoiffés, Montjoye vit soudain pénétrer sous la toile de tente l'illustre maître de maison qu'il n'avait encore eu l'occasion de rencontrer, mais qu'il manqua de peu d'abîmer d'entrée par son impitoyable tir de bouchon, évitant sans doute de peu le casus belli avec la Maison du Val de Loire.

Il se fendit alors d'une cordiale salutation :

" Montjoye, Raoul de Montjoye, bourreau des caves bourguignonnes en quelque sorte. C'est votre grâce un réel plaisir que de goûter à l'hospitalité de vos terres en cette gaie journée de tournoi et de Ripaille ... "

Alors que le savoyard se trouvait encore pris dans l'élan de sa courbette de rigueur, arrivèrent encore deux damoiselles qu'il salua par la même occasion d'égale courtoisie.

L'instant suivant messire s'affairait à s'exécuter selon la tradition, lèvres au goulot, avant de sourire d'un air satisfait en écoutant la suite de la conversation.